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Cuisine de la mer
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27 novembre 2006

Moules à la brule-doigts

De là haut je vois ma maison

Enfin un thème de photographie qui prend de la hauteur, après le bureau, la cuisine et le coin repas, je me demandais si on continuerait par des pièces plus intimes ou par la niche du chien ;-))

Mais grâce à Anne de Pupilles et Papilles, j’ai découvert à la fois ce nouveau "KKVJ" et le blog de Calou laquelle a eu cette bonne idée et habite en Nouvelle Calédonie. Je ne sais pas ce qu’on leur fait là-bas, mais on dirait qu’on les trempe dès l'enfance dans la bonne humeur, à votre avis Véro et Miss Tiny?  En plus, ils protègent les tortues, j'en connais une dans les ennuis électoraux ces temps-ci… Le jeu consiste à pointer sa maison sur la vue aérienne de Google Earth puis à la déballer sur le blog.

Google Earth, je suis adepte depuis longtemps, ça me permet de regarder depuis Paris si personne n’est en train de piquer mes pommes ou de ravager mes coins de pêche. C’est donc ma maison de Cosquer-Coum, Lannilis, Bretagne, que j’ai choisi de montrer, et tant que j’y étais, j’ai collé quelques informations pratiques pour ceux qui passeraient dans le coin ! Pour mieux vous situer, plein sud c’est Brest, plein nord c’est Polruan, Cornwall, plein ouest c'est Saint-Pierre et Miquelon. L'est, on n'y va jamais. 

GoogleEarth_Image

Sur l’un des marqueurs, j'ai signalé les moules de Beg-ar-Vill qui sont parmi les plus somptueuses que je connaisse. Ce sont des moules de corde. A ne pas confondre avec les moules de bouchot. Encore moins avec les moules de parc ou les moules de pêche. Le premier qui ajoute les moules à gaufres aura toute ma considération, tonnerre de Brest. On en causera un peu plus tard, d’abord le désormais petit survol historique, pour rester dans le thème from the sky.

La moule à travers les âges

Aucune trace sur les murs de la grotte de Lascaux, ou d'autres lieux, ne nous laisse penser à une utilisation fréquente de la moule en ces siècles de dénuement préhistorique. Pourtant, voilà un coquillage qui eut considérablement servi à nos ancêtres si démunis, ne serait-ce qu'en tant que petite cuiller pour boire le jus de la cuisson à la marinière.

L'antiquité est plus parlante, et on signale en particulier chez les Mèdes l'utilisation de la moule en tant que monnaie d'échange dans les clubs de loisirs, dits "Clubs Mèdes". Les Thraces furent également de grands utilisateurs de moules, afin justement d'en faire des moulages de Thraces.

Les Phéniciens, hardi peuple de navigateurs et de pêcheurs, perfectionnèrent les premiers la pêche de ce singulier coquillage, par l'utilisation des premiers moulinets, qui facilitaient grandement la capture de la moule une fois celle-ci prise au lasso.

Les Égyptiens furent toutefois ceux qui surent vraiment domestiquer les moules, et en faire l'élevage, dans des bâtisses spécialement conçues à cet usage, les moulins. De nombreux scribes décrivirent par le menu ces élevages, on a retrouvé dans une tombe de lettré les papyrus de mon moulin.

En latin, "moule" ne se dit pas "moulus", et c'est dommage, car j'avais un truc tout prêt avec Romulus, le fondateur. Et j'ai beau réfléchir, il semble que les romains ne s'occupaient pas de moules, sauf parfois les augures qui lisaient dans leurs entrailles pour savoir si elles étaient fraîches.

Au Moyen-Age, une utilisation intéressante des coquilles vides était faite par les sorcières pour leurs maléfices. Les coquilles servaient de moules pour fabriquer des suppositoires destinés aux envoûtements à distance. La sorcière devait attendre le moment opportun pour les lancer au destinataire de l'envoûtement. En cas de mauvaise trajectoire, la forme de boomerang donnée au projectile par la coquille permettait à l'officiante de récupérer son instrument maléfique, fabriqué avec des substances rares et coûteuses.

Ce mode de fabrication des suppositoires a été abandonné dès la Renaissance, et c'est dommage, car on rigolerait beaucoup plus dans les hôpitaux. Pourtant, c'est à cette époque bénie par l'intelligence qu'apparut pour la première fois ce charmant bivalve dans les débats théologiques : Fallait-il vraiment continuer à baiser la moule du Pape? Les protestants conclurent dans un autre sens.

Avec les Grandes Découvertes, ce fut la moule d'Espagne qui assura sa domination sur une large partie de la planète : Christophe Colomb ne disait-il pas lui-même : "J'ai eu de la moule", exprimant ainsi qu'il ne lui restait que celles collées à son bateau pour se nourrir à la fin de sa traversée. Toute autre rumeur à propos d’un œuf est infondée.

Par la suite, la moule a cessé toute activité historique pour se cantonner dans une fonction strictement gastronomique. En effet, après avoir découvert le monde, l'homme est devenu blasé : Quelle importance pouvait-il désormais accorder à cet humble mollusque ?

Moules à la brûle doigt

Revenons-en aux moules de corde. C’est une technique d’élevage qui consiste à les suspendre assez loin de la côte sous un filin flottant grâce à des bouées, exactement comme les huîtres perlières, mais dans les abers, on trouve que c’est bien meilleur les moules.

corde

Il y a plusieurs avantages à ce mode d’élevage :

- Les moules sont constamment brassées par la mer et élevées dans un milieu très sain; elles développent un goût iodé agréable au palais, bénéficiant sans concurrence  de la qualité et de la richesse de la faune et de la flore. Une moule peut filtrer jusqu’à 6 litres d’eau à l’heure, et je ne l’envie pas.

- L’exploitation au large évite aussi les conflits d’accès au rivage et l’envasement consécutif à la présence d’élevages sur l’estran, c’est souvent le problème posé par l’élevage en bouchot (le bouchot désigne une rangée de pieux, non pas le pieu lui-même) ou en parc.

- C’est un élevage au rythme des saisons, les filières sont mises en place en mars, selon l’état de la mer, les moules grossissent pendant le printemps, et sont prêtes à déguster à l’approche de l’été. Elles sont retirées à l’approche des tempêtes d’automne.

- Elles ont une saveur marine plus développée que celles élevées sur bouchots, et elles sont beaucoup plus grosses, car elles ne sont pas contraintes à s’arrêter de manger à marée basse ! En voici une platée, ouvertes avant d’être farcies de  beurre au cumin.

Moules1

Dans l’ordre de mes préférences, c’est la bouchot qui vient ensuite, puis la moule de parc (je lui reproche cependant un léger goût de vase) et les moules de pêches (moules pêchées au large, puis mises à affiner dans des bassins pour les dessabler), dont j’aime moins le manque de finesse (les moules de Hollande en sont un exemple). Une mention spéciale à la moule d’Espagne, savoureuse crue ou dans quelques tapas. Il y en a bien d’autres, comme celles du Midi, utilisées pour la fameuse recette des moules à la sètoise.

Les moules de corde d’à côté de la maison, je leur invente au moins une nouvelle recette par an, mais c’est encore natures, à la brûle-doigt qu'on peut vraiment connaître leur saveur brute.

Munissez vous de moules de cordes ou de celles que vous aimez, et d’un récipient en tôle assez mince, genre plat à paella de bazar. Faites le chauffer à blanc, et versez-y les moules de façon à ce qu’elles tiennent sur une seule couche. Continuer à feu vif, en remuant jusqu’à ce qu’elles s’ouvrent bien. A l’apéro ou comme entrée rapide, c’est parfait. J’aime bien les tremper dans de la pâte de piment d’Espelette, mais je suis un peu capsaïcino-dépendant!

moulebd

Pour les farcir de beurre au cumin : c’est simple, on fait un beurre avec du persil et de l’échalote hachés en proportion raisonnable, on ajoute du cumin, du piment, du macis. On met un peu de ce beurre dans les moules justes ouvertes (dans une casserole fermée cette fois) dont on jeté l’une des coquilles, la vide. Une pincée de chapelure et au four genre 180°. Lorsque le beurre commence à bouillonner, terminer la cuisson en mettant le four sur gril.

insultemg

 

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Commentaires
F
Pourquoi tu m'as envoyer lire ce post qui me donne envie de manger des **tain de moules !<br /> Tu as un côté sadique je crois !<br /> Pourquoi le moules que je cuisine sont toujours petites rabougries ?<br /> Dis, en juin, quand je vais viendre squatter ta maison du bout du bout du haut, tu me feras des moules ? <br /> Sitolpé !!!!
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R
Excellent ! <br /> Tu as retrouvé les 2 euros perdus ? Et depuis tu as regardé si il n'y avait pas plein de gens à la recherche de ces 2 euros ? lol<br /> Bises.
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A
Mon dieu, tu vas me faire mourir de rire !
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H
Je me suis régalée à la seule lecture de ce billet. Je glisse ton blog dans mes favoris, pour n'en plus louper aucun.<br /> Bon, et puis je pars tout de suite à la pêche aux moules (chez le poissonnier, parce que chez nous, même s'il y en avait, je n'aurais pas confiance...) parce que ton beurre de cumin me fait de l'oeil, à moi aussi.<br /> A bientôt<br /> Hélène
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P
En voilà encore une essayée et adoptée. Les copains de l'apéro d'hier soir ont adoré le beurre de cumin. Merci aussi pour votre petit coin de campagne (de mer). C'est un joli coin que je ne connaissais pas et que j'ai découvert en Septembre.
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