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Cuisine de la mer
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31 août 2007

Sardines en salade au vinaigre de framboise

Avant d'entrer dans le vif de ce billet, et à la suite du précédent, quelques nouvelles du procès du naufrage du Sokalique  (dont je connais depuis samedi dernier la clé du nom étrange, pour être passé devant la maison de son Patron qui a péri lors de cet éperonnage, en compagnie des amis qui nous emmenaient sur leur bateau pour la partie de pêche que j'évoque ci-dessous. En fait, c'était une contraction du prénom de ses trois filles, "Sophie, Karine et Angélique", j'ai une pensée pour elles avant de commencer ce billet sur l'enfance) .

Les autorités du Kiribati sont réticentes à l'idée d'autoriser la délocalisation du procès en France (sans blague?), le président Sarkozy va rencontrer un émissaire et ils vont faire de leur mieux. En attendant, les marins pêcheurs bretons ont manifesté dans la rade de Brest mercredi dernier, et la veuve a été reçue hier à l'Elysée, apparemment, personne ne lache le morceau. Je ne sais pas si notre président va réussir cette francisation du procès après celle de l'enquête, mais s'il veut remonter dans l'estime des bretons, il y a tout intérêt après les propos qu'il a tenus sur les gars du Cross Corsen (dont je montrais également quelques images ouessantines la semaine dernière, ce blog est un véritable hublot sur l'actualité (!).  Bon, je reprends le fil de ma petite marée du jour...

Grandir avec la mer

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Dès qu'il trottine, menez votre enfant à la recherche des bigorneaux jaunes, chapeaux chinois, os de seiche, plumes blanches ou grises et galets aux formes diverses : vous verrez qu'il trouve souvent des cœurs. Ayez de profondes poches pour rapporter ses trésors les plus beaux ou les plus incongrus, bois flotté, poignée de sable brillant de paillettes de mica, coquillage ébréché ou dépouille de crabe encore odorante.

Montrez lui  les vagues glissant sur le sable fuyant, tentant de s'emparer de ses pieds, et reculez en criant avec lui lorsque l'une d'elles s'approche plus vite et plus près.

Sur le sable humide, laissez le dessiner, creuser ou construire, décorer de coquilles, galets et fleurs des dunes, voire tabasser à coups de pelle ces puces de mer décidément très agaçantes.

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Un peu plus grand, il peut et veut vous suivre dans les rochers, apprenez lui à poser le pied-attention-çà-glisse, à découvrir la vie dans les flaques, les poissons furtifs, les algues aux couleurs folles, les anémones-attention-çà-pique. Capturez à la main une crevette rose et montrez lui comme elle frétille, vous pouvez aussi la lui faire goûter vivante, il la mangera plus par bravade que par conviction. De même, faites lui découvrir à même l'estran la saveur d'un coquillage tout juste pêché. Il gobera tout comme un jeune goéland, lorsqu'il grandira, il sera plus circonspect et ce sera peut-être trop tard!

C'est le bon moment pour les crabes également, un tout petit crabe vert au creux de la paume tendue, çà chatouille et çà déclenche un fou rire. A la pêche aux étrilles, lorsque vous soulevez les cailloux, demandez lui de repérer les crabes qui tentent de se sauver, les gros de préférence, çà motive et çà provoque des cris d'excitation comme vous n'en aviez encore jamais entendu.

En fin de pêche pour souffler un peu, asseyez le près de vous sur un coussin de varech pas trop mouillé, et jouez à écouter ces bruits de bulles et ces grattements de carapaces frottant les rochers, et toute cette rumeur de la marée basse. Jouez aussi à respirer et à regarder. Il a désormais assez de force pour faire craquer seul les flotteurs des goémons secs. Il est déjà temps pour lui d'apprendre à nager et de s'essayer aux premiers ricochets de cailloux plats.

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Un peu plus tard, il est en âge de pêcher par lui-même, avec un haveneau pour les crevettes, une fourchette pour les rigadelles ou une salière pour les couteaux. Guidez sa main sans la remplacer, laissez le aux prises avec son appréhension,  lorsqu'il lui faut marcher dans une mer emplie d'algues dansantes d'où le guettent des créatures mystérieuses. Partagez son émotion lorsqu'il découvre une grosse crevette ou toute autre provende inattendue au fond du filet, vous allez vous reconnaître dans son regard émerveillé, enfin, je l'espère pour vous.

Vous pouvez aussi l'installer sur une jetée avec une mini canne à pêche, il prendra bien deux ou trois fretins, mais vite alors, car la patience n'est pas son fort… il doit tenir de son père!

Le moment est arrivé pour lui de prendre la barre d'un bateau, parce que vient le désir d'autonomie, et quoiqu'il vous en coûte c'est par définition sans vous qu'elle s'acquiert. Vous allez le confier au club de voile du coin où dès le premier jour, il va se retrouver avec en mains la barre franche et l'écoute d'un Optimist, ce merveilleux vaisseau d'apprentissage, coquille de noix d'où le moindre clapot est tempête. On n'oublie pas la première fois où on prend la barre d'un bateau. Quelque soit l'âge auquel on a commencé, on retrouvera par la suite cette sensation magique sur chaque nouveau rafiot qu'on gouvernera.

Le soir, vous le récupérez exténué et trempé, avec dans les yeux cet éclat de joie qui prouve qu'il s'est approprié les lueurs de la mer et la saveur de la liberté. Dites vous bien que c'est moins dangereux que le vélo!

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Lorsqu'elle a bien grandi (je vous parle de ma fille maintenant), plus question de l'arnaquer avec des jeux de plage, des ronds dans l'eau ou une canne à pêche pour enfant, elle s'embarque pour plus loin avec nous, s'empare sans complexe de ma canne de compétition ou de celle de sa mère, lance au petit bonheur la chance, et la chance est vraiment avec elle (et avec nous, de ne pas avoir eu un lambeau de chair arraché ou un œil crevé par les dangereux grappins des leurres de pêche).

Son leurre fini par arriver dans l'eau au bout de son crin, à une dizaine mètres du bateau, c'est un bon début. Presque tout de suite la canne se met à ployer et second miracle (je soupçonne les poissons de désigner des victimes expiatoires lors de la pêche initiatique d'un innocent), vous voyez un très joli bar qui se met à louvoyer comme un furieux au bout du crin. Elle rembobine alors rapidement et entreprend de remonter le poisson à bord, troisième miracle, on a tout juste le temps de lui crier de le laisser dans l'eau (le soulever est le meilleur moyen de perdre le poisson) et de se précipiter avec l'épuisette. C'est comme cela que depuis samedi dernier elle est toute contente : "C'est mon premier poisson, et c'était le premier et le plus gros de toute la pêche". Ce qui est rigoureusement exact hélas, car çà n'a pas donné terrible et ce fut petit, on a remis à l'eau la moitié des prises.

Peu après, estimant sans doute  son devoir accompli ou que le nouveau poste de pêche choisi était improductif, elle a sauté du bateau par la poupe pour prendre son premier bain au large. Je trouve quand même qu'à onze ans, elle a déjà l'autonomie un peu trop profonde et frisquette pour que j'accepte, à mon tour, de la suivre à la mer.

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Vous devez me trouver un peu court avec ma recette de sardines de rien du tout, alors que Mathilde a attrapé un bar, mais lorsque je lui ai demandé comment elle voulait que je cuisine son poisson, la réponse est tombée nette et claire : "Nature !". Alors ce furent les filets levés, un aller-retour à la plancha entre deux feuilles de papier sulfurisé, servis avec au choix du beurre fondu ou de l'huile d'olive, et de la fleur de sel. Croyez nous, c'est l'une des meilleures façons d'apprécier le bar de ligne (sur cette photo, il y a évidemment deux poissons en filets)!

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Sardines en salade au vinaigre de framboise

Donc des sardines, une recette découverte dans un excellent restaurant de Lyon (que m'a recommandé le non moins excellent Patrick Chazallet), en compagnie d'une amie tout aussi  fondue que moi de Bretagne et de mer, qui aime beaucoup les sardines et est également un peu cuisinière à ses heures, c'est dire si la plus parfaite entente règne parfois entre nous. Ce fut le cas à propos de la saveur de cette entrée toute simple.

Ce restaurant s'appelle "En mets fais ce qu'il te plaît". En cuisine (je devrais dire "kitchenette") un japonais, qui aime visiblement le poisson et les épices, envoie des assiettes lui aussi un peu au petit bonheur la chance, relayé en salle par son épouse. L'endroit est très familial, en entrant vous enjambez un petit garçon rêveur, assis sur les deux marches du perron de ce qui ressemble à une cabane accrochée par hasard à ce quartier de Lyon. Vous découvrez alors un lieu au mobilier de bois de couleurs pastel, et vous éprouvez comme un sentiment de provisoire qui vous fait imaginer que vous êtes à l'escale d'un voyage un moment interrompu, impression confirmée par les colis et cartons empilés dans la première salle.

Katsumi Ishida y prépare une cuisine du marché, simple mais inventive et souvent surprenante. Un garçon totalement éclectique, procurez vous aux Éditions de l'Épure "L'huile d'olive, dix façons de la préparer" et "Le vin, dix façons de le préparer", cela vous donnera une idée de ce qu'il peut faire si vous n'avez pas l'intention d'aller jusqu'à Lyon.  Mais arrêtez-vous  si vous êtes dans le coin, les tarifs sont encore raisonnables au regard de la qualité et j'ai retrouvé pas mal de potes sur la carte des vins.

Ingrédients

- trois sardines par personne
- la salade du jardin ou du marché
- huile d'olive douce
- vinaigre de framboise
- poivre blanc
- poivre du Sichuan
- sel fin

J'ai reconstitué cette recette en fonction de ce que nous avons décelé dans les assiettes, et je suis tombé très proche de ce que nous avons dégusté, sans être certain d'y avoir mis tous les ingrédients.

Recette

Écaillez et levez les filets des sardines. Rincez et épongez les soigneusement. Réservez. Lavez la salade (là ce fut une laitue rouge que j'ai trouvée magnifique et délicieuse, mais un mesclun conviendrait mieux), et coupez un peu les feuilles. Préparez une vinaigrette avec du vinaigre de framboise (assez copieusement) et de l'huile d'olive (pas trop, le poisson apporte aussi du gras), du sel, un peu de poivre blanc et pas mal de poivre du Sichuan concassé.

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Cuisez vos sardines à la plancha ou dans une grande poêle épaisse pour bien pouvoir la chauffer. Lorsque qu'elle est bien chaude, procédez comme ci-dessus : disposez une feuille de papier sulfurisé et placez les filets  (très légèrement huilés) à cuire côté peau. Lorsqu'ils commencent à blanchir sur le pourtour (cf. la photo), coupez le feu et retournez les filets, la cuisson est terminée; salez légèrement.

Placez les encore chauds dans les assiettes, et posez la salade assez largement assaisonnée de la vinaigrette par dessus, servez aussitôt.

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Lorsque nos assiettes sont arrivées à table, nous avons été d'abord surpris par la présentation, à savoir les sardines posées sous la salade. Habituellement, lorsqu'on sert ce genre de préparation, on dispose la salade comme un coussin et on place par-dessus l'ingrédient vedette. C'est là que réside l'une des clés de la réussite de ce plat : Entre le moment où l'assiette est dressée et celui où on commence à la déguster, la vinaigrette a coulé sur les sardines, les parfumant ainsi subtilement.

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Pour les verres, afin de rester en harmonie avec la framboise, je me suis dirigé vers un gamay qui n'est que fruit (beaucoup de groseille dans cette bouteille de 2005), la cuvée "Gammes en May" (qui aurait tout aussi bien pu s'appeler "En gamay, fais ce qu'il te plaît" car il est assez surprenant). Le vigneron, c'est Thierry Michon, du Domaine Saint-Nicolas dans les Fiefs Vendéens, un bio de chez biodynamique que j'apprécie beaucoup.

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Pour conclure tout en restant dans les fruits rouges, je vous rappelle que la sixième édition du "Sucré s'invite chez le salé" se termine, et que vous n'avez que jusqu'au 2 septembre pour m'adresser vos recettes salées contenant une ou des fraises!

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Commentaires
M
bravo et merci pour ton blog.toute la famille du patron du sokalique te remercie de penser à elle et bravo pour tes recettes tu honores tous les produits de la mer et les marins,BERNARD adorait la bonne cuisine en lisant tes recettes tu l'aurais fait saliver;MERCI
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M
Ce billet est superbe et c'est la première fois que je mets un commentaire sur votre blog, car je suis toute nouvelle sur la blogosphère et me familiarise avec vous tous. Je suis ravie que vous appréciez le Fief Vendéen de chez Thierry Michon qui ne se trouve pas très loin de chez moi. Ce gamay est vraiment à découvrir. Mes meilleurs souvenirs d'enfance de pêche à pied sont, en ce qui me concerne, ceux de la pêche aux pignons (tellines dans le sud) que je remassais, gamine, avec mon papa sur la plage de Saint-Jean-de-Monts. Ce sont des petits bonheurs qu'on n'oublie pas.
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M
Le mariage sardine salade de poivrons pour moi est parfait. Je ne souhaite pas leur divorce.
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L
moi gamay c'est mon produit de beauté....ok je sors !
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E
Tu ne vas pas me croire, si je te dis que je n'ai pas encore mangé de sardines cet été...? Tu me donnes terriblement envie, là... :-)
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