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Cuisine de la mer
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30 novembre 2007

Tartare de saumon au nashi et shiso

Oui, mais non quand même, car si j'avais vraiment voulu présenter une recette à l'intitulé imprononçable, ce n'est pas un tartare que j'aurais concocté, mais des sushi. Entraînez vous à prononcer à voix haute "Sushi de saumon au nashi et shiso", vous constaterez qu'en comparaison, les chaussettes de l'archiduchesse autorisent un élégant phrasé à la Gainsbourg. Bref un plat qui se postillonne autant qu'il se mange...

Ne venez toutefois ni vous plaindre, si vous tentez l'expérience, ni me laisser des commentaires vengeurs du genre "J'en bave sur mon clavier" ou "Je projette du muesli à travers l'écran", ce dernier avis spécialement destiné à ceux qui s'obstinent à venir lire mes billets de mareyeur cradingue au petit déjeuner.

Tartarinons un peu...

Je me suis souvent demandé pourquoi on donnait le nom de "tartare" à ces préparations de viande, poisson (et même légume ou fruit, rien ne les arrête!), coupés en petits morceaux et assaisonnées... J'ai ainsi profité de ce billet pour effectuer des recherches approfondies.

- Dans l'antiquité grecque , le Tartare est l'opposé des Champs-Elysées, l'enfer donc, où sont confinés les impies et les malfaisants ordinaires, mais aussi des pointures comme Tantale, Sisyphe, les Danaïdes, les Titans, les Aloades, etc.. Quand je dis "confinés", c'est une façon édulcorée d'évoquer les choses. Selon Homère, une créature, la Gorgone, y est appointée pour faire régulièrement le ménage et le repassage. Son boulot est d'avaler les damnés, puis de les recracher une fois ceux-ci carbonisés.

enfers

Outre le fait que nous restons dans l'expectoration (et que je ne saurai trop vous inciter à équiper vos écrans d'essuie-glaces pour lire la suite), je suis au regret de constater que j'ai fait fausse route en cherchant dans cette direction : En effet, le tartare se compose essentiellement de chair crue et non de viande carbonisée (encore que rien ne les arrête, je suis certain que branchitude et bloggitude aidant, on verra bientôt marqué "Tartare du potager" sur les boîtes de macédoine de légumes; par ailleurs, le tartare de boeuf poêlé est très trendy).

- Les cavaliers tartares, ceux-là, on les connaît bien, ils ont déferlé un peu partout en Europe, la seule limite à leur expansion étant la fatigue de leurs chevaux, dont selon la légende ils ne descendaient que pour se reproduire (et encore pas tous). La petite histoire raconte que même pour cuisiner, ils restaient à cheval, coinçant une tranche de viande entre leurs fesses et le cheval, afin de l'attendrir avant de la dévorer tout en galopant. Je n'y vois pas pour autant l'origine du tartare, car il n'est indiqué nulle part que la viande était hachée, ce qui limite clairement l'intérêt de l'attendrir (et que personne ne vienne me dire que ce n'est pas un tartare ci-dessous, mais un mongol, je suis déjà au courant).

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Toutefois, je tirerai profit de la méthode la prochaine fois où j'irai rassembler à dos de bidet breton les troupeaux de bêtes à cornes dans les vastes prairies marines de l'ouest, je placerai des poulpes ou des ormeaux sous mes fesses, afin de les attendrir (et je mettrai un masque de Totoro afin de rester incognito ).

bon

- La littérature. A force de ne pas trouver, je me suis énervé, alors je me suis lancé dans la relecture intégrale de ma bibliothèque, classée par auteur comme il se doit, et ce n'est que parvenu à la lettre "V" que j'ai enfin trouvé. L'inventeur du steak tartare, c'est le très imaginatif Jules Vernes, hélas pas dans "Vingt mille lieues sous les mers", ce qui m'aurait comblé d'aise, comme vous le savez bien.

Non, c'est dans "Michel Strogoff," histoire de donner un peu plus de typicité aux moeurs tartares (qui sont à l'origine des "tatars"; nous autres occidentaux effarouchés en avons fait un néologisme (ancien, mais néo quand même) avec "barbare").

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Je l'ai trouvé un peu timide, le Jules sur ce coup là, puisqu'il avait la tête à la cuisine, il aurait tout aussi bien pu appeler son héros Michel Strogonoff et situer l'action dans l'Archipel du Goulasch. Par ailleurs à sa place, je n'aurais pas non plus tourné le dos à un Rossini, mais c'est une autre histoire qui se passe chez Emilie, où tout est plus élégant que l'abominable sauce tartare, plus frais que le fromage industriel du même métal, et infiniment moins prétentieux que celui de Tarascon!

Bon assez parlé de viande sur CdM, çà devient limite, je vous livre à présent rapidement cette recette, car bien que parti assez tôt, je suis déjà tartare.

Tartare de saumon au nashi et shiso

Ingrédients

- 350 grammes de chair de saumon
- un nashi
- feuilles de shiso
- gingembre frais
- sauce de soja
- huile de sésame

- Le saumon, je vous conseille de le prendre d'élevage, j'ai une préférence pour certains bios et le Label Rouge d'Ecosse. Si vous préférez du poisson sauvage, on recommande de le congeler pendant 20 heures  pour tuer les parasites, si on le mange cru.

- Le nashi : C'est une poire. On l'appelle aussi "pomme-poire", "poire asiatique" ou "poire japonaise". Commercialisé depuis seulement quelques années en France (c'est un néo-nashi), c'est un fruit riche en eau, dont la chair très croquante s'apparente en effet à la texture d'une pomme, de même que sa forme, mais dont la saveur de poire bien que discrète, est présente. On a longtemps cru que c'était une plante de la même famille que la pomme de terre, et il était assez courant de préparer ce fruit en nashi parmentier.

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Son intérêt est d'apporter cette texture croquante dans le tartare de saumon. C'est je pense dans la même intention que, sur "Cuisine Campane",  Lilo a réalisé voici quelques temps un beau "Tartare de saumon à la pomme Fuji ..." qui m'a probablement inconsciemment inspiré lorsque j'ai fait les courses pour cette recette. Attention, c'est un fruit fragile comme la poire, ne le malmenez pas et ne laissez pas tomber un nashi par terre!

- La feuille de shiso possède une saveur évoquant la menthe, la graine de cumin et une discrète saveur de citronnelle. Certains lui trouvent un goût de persil et de cannelle, pas moi. On la nomme parfois "basilic japonais", alors que la plante serait plutôt de la famille des bégonias (?). De fait, comme pour le basilic, il en existe une variété pourpre, à la saveur bien plus capiteuse. Vous en avez probablement déjà consommé sans le savoir, c'est en effet cette plante qui aide à la conservation du gingembre émincé présenté avec les sashimi, ce qui explique sa teinte rosée. Par contre je l'ai vérifié, il n'existe pas de shiso-frêne.

shiso

Toujours comme notre basilic, il convient de la couper sans l'écraser afin de lui conserver sa pleine saveur. Si vous n'êtes pas un as du couteau, utilisez des ciseaux pour ciseler votre shiso (le temps se remet au crachin, on dirait).

Recette

Commencez par parer votre morceau de saumon en ôtant la peau, les arêtes et les parties blanches très grasses ou coriaces parfois. Au fur et à mesure, placez les morceaux de poisson dans un grand bol d'eau avec des glaçons, ils seront ainsi plus fermes et donc plus faciles à couper au couteau.

Épluchez et coupez le nashi en petits cubes également, envisagez une proportion 1/3 de fruit pour 2/3 de poisson. Ciselez finement six feuilles de shiso (sans la nervure), en conservant une belle pour décorer chaque assiette. Coupez en très petits dés un morceau de gingembre frais, une petite noix. Si vous ne pouvez pas vous procurer de gingembre frais, utilisez de la poudre plutôt que le rhizome sec, difficile à couper menu et parfois gênant en bouche, car fibreux.

Coupez le poisson en petits dés, et incorporez lui une généreuse cuiller à soupe de sauce de soja, une moyenne cuiller d'huile de sésame, le nashi, le shiso et le gingembre. Dressez à l'aide d'un cercle. Le tartare n'est normalement pas aussi foncé, mais j'ai utilisé dans un moment de distraction du dark soja, c'est l'autre qu'il faut!

saumnashi

De plus en plus souvent, je dispose des graines germées à la saveur un peu piquante (radis, poireau ...) en contrepoint de certains tartares ou carpaccio, elles compensent bien le côté un peu douceâtre de la chair crue des poissons gras, comme le thon, le saumon, le maquereau, etc... A utiliser également avec ces mêmes poissons fumés.

Le citron est purement décoratif dans mon assiette, mais pas dans celle de Sylvie qui n'imagine pas manger de poisson cru sans un filet de jus de citron. Là je l'ai feintée, vous remarquerez qu'ils sont tout petits, et plein de pépins (pas fait exprès, je le jure!). En fait, il s'agit d'un croisement entre le citron vert et le kumquat (un limequat selon le nom officiel, il a vraiment des gens qui ont la créativité débordante, j'y crois pas). Plus une curiosité qu'une révolution gustative, mais il vont très bien dans le 'ti punch (je n'allais tout de même pas les jeter!).

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Commentaires
P
Je me balade sur la toile à la recherche d'idées originales pour utiliser mon shiso fraîchement acheté, et je tombe ici, j'aurais du y penser...<br /> Débuter le 11/11/11 par quelques éclats de rire et un projet de déj qui fait voyager, pas mal :) Bon week-end!
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W
Merci beaucoup pour cette idée de recette. Seulement voilà, ayant une sorte d'aversion pour le saumon, je me demandais ce que cela pourrait donner en le remplaçant par du bar de ligne. Du même coup on prend moins de risque avec les parasites comme l'anisakis et on a un poisson légèrement moins gras en bouche. Pour utiliser le shiso que je cultive, j'ai imaginé cette recette à base de confiture d'algue et visible ici :<br /> <br /> http://wabisabi.sushi.over-blog.com/article-feuille-de-shiso-l-ete-en-bouche-78783748.html<br /> <br /> Encore merci, visiter ton blog et te lire et toujours un plaisir.
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V
Le nashi parmentier, niark niark, je me marre encore... Pour le poulpe sous les fesses, heu... tu nous tiens au courant...<br /> Un billet "Grand Patrick" comme j'aime, mais j'avais déjà envie de sushi, là je te dis pas... Le tartare, pour moi, c'est deux extrêmes: aversion pour celui de viande, addiction pour celui de poisson!! <br /> Saumon d'élevage, donc!? Ca m'arrange, le saumon sauvage se fait rare sur les étals j'ai l'impression...<br /> Bisous!
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A
enorme ce billet!! il commence par me rappeler mes errements de lainiste, m'ayant fait découvrir le tartare, il se poursuit sur la découverte de deux produits inconnus de mes papilles mais si bien décrits que j'ai l'impression de les avoir en bouche, et il se termine en beauté par la conclusion sans appel: à tester, absolument!
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G
(et encore pas tous) - j'ai l'image en tete, et le sourire aux levres.
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