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Cuisine de la mer
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7 novembre 2010

Anges à cheval et panais grillés

Panais de la dernière averse ou des neiges d'antan.

Dans le Dictionnaire argot-français écrit par Napoléon Hayard en 1907, le mot panais désigne assez médiocrement le pan d'une chemise, ce n'est que plus tard qu'il s'est autorisé à désigner le pénis (je connais des pointilleux qui préciseraient pénis "masculin"). Pour rester dans la métaphore potagère, tremper le panais est une manière plus ambitieuse ou prétentieuse de tremper le poireau. Bien entendu, cette définition n'a strictement rien à voir avec le sujet de ce billet qui concerne des anges, fussent-ils à cheval.

Pastinaca

En Bretagne, on est nettement plus près des réalités, les "pikou panez" ou "taches de panais", désignent les éphélides, ou taches de rousseur. Quiconque a déjà pelé ou coupé un panais sait que si on le laisse à l'air, il va vite se couvrir de petites pointes (pikou) de couleur brune. Par chez nous, le panais était, et est toujours une ombellifère (pas ombrellifère hein, car c'est le soleil qui fait ressortir les taches de rousseur) appréciée, incontournable dans notre fameux kig-ha-farz léonard, plat auquel je voue un véritable culte, bien qu'il ne comporte pas un gramme de poisson, sauf dans quelques variantes avant-gardistes et provocatrices...

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Le panais fut une panacée pour les léonards, allant jusqu'à créer du lien social entre voisins, si l'un d'entre eux venait à manquer de pain de seigle ou de panne de lard, il pouvait aller frapper aux portes alentours (lesquelles étaient toujours ouvertes, sauf en cas de naissance, de deuil ou de vent de suroît) pour se faire des panais.

Ceci n'a toujours rien à voir avec les anges dans nos campagnes, au contraire même, puisque les personnes ayant des taches de rousseur en excès, souvent les roux, étaient considérés comme des auxiliaires du diable, et quand aux femmes qui en présentaient sur le corps, on prétendait (probablement à tort) qu'elles avaient tâté du panais de Satan.  Enfin quand même, Lucifer est un ange déchu, aurait-il chu de cheval en voulant cueillir une fleur de talus?

Notez pour finir que la grande berce, commune un peu partout sous nos climats, porte parmi différents noms vernaculaires ceux de "panais sauvage" et "herbe au diable". Je dis ça et je ne dis rien...

berc


Éphéméroptère

Je sais, il vaut mieux dire "éphéméride", mais je préfère utiliser ce mot qui désigne cette classe d'insectes qui ne vit qu'un jour ou deux à l'état adulte, mais dont la larve aquatique peut vivre plusieurs années, puisque, une fois n'est pas coutume, je vais vous parler un peu de la blogosphère culinaire, voire de l'air étrange qu'on y respire parfois.

- D'abord (et à propos d'éphélides qui lui vont à merveille l'été), avec ma copine du grand est breton de granit rose "A Turtle In A Kitchen", nous serons présents au Salon des Blogs Culinaires de Soissons, pour une démonstration de tapas de coquillages et de sablés bretons aux pommes et aux épices, bref ambiance plage. Ce Salon est réservé aux blogueurs, mais je vous en donnerai quelques échos, soit ici, soit sur la page Facebook de Cuisine de la Mer.

- Ce Salon est organisé sous l'égide de Chef Damien et de l'équipe du site 750grammes, qui organise périodiquement des challenges de recettes sur un thème donné. Ce mois-ci, il s'agit de "Passion saumon", et je suis dans le jury avec Mikaël Féval, le jeune chef du délectable mais onéreux restaurant de poisson parisien "Antoine". Je trouve ce concours bien doté, à me faire regretter de ne pouvoir y participer.

- Il y a un truc qui m'a récemment beaucoup surpris sur la blogosphère, et ses territoires annexes que sont Facebook et Twitter, c'est la création d'un front anti-cupcakes, sans déconner... après tout, on a les combats que l'on mérite, et si on ne trouve pas mieux pour exister dans la course à l'audience permettant de gagner quelques sous à partir de son blog, on peut choisir de ranger son âme d'enfant dans un tiroir-caisse.

Ces quelques mots un peu durs (et négligeant l'humour que la plupart des gens mettent dans ce genre de foucade), pour préciser à l'occasion, car on devient presque contraint de le faire en raison du déferlement mercantile des opérations de promotion sur les blogs de cuisine, que tout ce que je fais sur CdM est parfaitement gratuit, que la publicité qui apparaît sur ces pages est du ressort de mon hébergeur gratuit "Canalblog". Que lorsque je participe exceptionnellement à une opération, c'est vraiment parce qu'elle m'intéresse par son contenu ou pour les personnes que je vais y croiser, voire pour faire plaisir à quelqu'un.

- Mon univers pâtissier se limite aux farz et tous autres machins au beurre salé, aux babas au rhum et aux gâteaux auxquels ma fille s'essaye régulièrement avec des progrès incontestables. Alors pensez bien que les cupcakes mignons, parfois un peu cuculs, il n'y a aucune chance que je les aime ou les déteste, du moins tant qu'on ne m'en propose pas au surimi, nous avons tous nos points de rupture.

Oui mais ma fille, lorsqu'elle est allée à New-York au début de cette année faire du musée et du shopping avec sa mère, elle a tenu à faire un détour par la célèbre Magnolia Bakery, qu'on peut considérer comme le temple du cupcake.

Alors depuis qu'elle sait que notre commune référence en matière de livres de cuisine, Esterelle Payany (dont elle m'a piqué les premiers livres et réalisé ses premières recettes alors qu'elle avait dix ans à peine révolus), vient de publier aux éditions Solar un livre sur ces fameux cupcakes, elle se demande pourquoi je ne suis pas encore à La Librairie Gourmande pour le lui acheter, ce que bien entendu, je vais tacher de faire rapidement...

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Un ange passe, les ailes poudrées de paillettes et de sucre glace...


Angels on horseback

Tel est le véritable nom de cette recette, originaire très probablement de Colchester au Royaume-Uni, où les huîtres sont vraiment fameuses, les romains s'en régalaient déjà. Cela consiste en des huîtres dé-coquillées, roulées dans un morceau de bacon, et grillées. C'est délicieux.

J'ai réalisé et détourné cette recette de son origine anglaise, pour participer à un concours organisé sur le blog "Une cuillerée pour papa", écrit par Marie-France, qui avait eu la gentillesse de participer (et gagner) à celui que j'ai organisé au premier semestre de cette année. Les contraintes étaient intéressantes, puisqu'il s'agissait de marier un coquillage ou un crustacé à une viande terrestre, et le panais devait figurer dans les ingrédients. Dans les abers, on cuisine toujours entre terre et mer, ce sont des associations que j'adore, beaucoup figurent déjà sur ce blog. Si vous voulez participer à ce défi, cliquez sous l'image ci-dessous pour en connaître les modalités, il vous reste jusqu'à fin novembre!

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Il faisait un doux soleil en Bretagne la semaine dernière, alors qu'habituellement en cette période, vent et pluie se font un devoir de sinistrer les pots de chrysanthèmes de la Toussaint, j'ai donc voulu donner une couleur italienne à cette préparation.

Anges à cheval et panais grillés

Ingrédients

- huîtres creuses spéciales, calibre 2
- bandes de lard de Colonnata, très finement coupées
- poivre long
- vinaigre balsamique
- panais
- thym citron
- ail
- huile d'olive
- poivre noir 

Le lard de Colonnata est un lard gras, considéré comme le meilleur du monde, opinion que je partage. Colonnata est un petit village près de Carrare en Italie, célèbre pour son marbre blanc. C'est justement dans des auges couvertes, taillées dans ce précieux matériau que le lard est entreposé dans la montagne pour maturer durant au moins six mois, avec différents herbes et aromates.

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Recette

La veille ou quelques heures avant le repas, pelez les panais et coupez les dans la longueur en tranches fines, d'environ un à deux millimètres. Plus fines, elles sécheraient trop à la cuisson. Sur une plancha, faites les griller rapidement pour légèrement les colorer, puis mettez les à mariner avec de l’huile d'olive, des feuilles de thym-citron et une pointe d'ail.

Ouvrez les huîtres au dessus d'une passoire fine et d'une casserole, afin d'en recueillir l'eau. Retirez les poissons de la passoire, et pour éviter que des morceaux de coquille restent dissimulés dans le manteau, rincez les rapidement sous un filet d'eau, cela ne modifiera pas leur goût.

Placez quelques morceaux de poivre long dans l'eau des huîtres et laissez cuire à feu doux environ cinq minutes. Faites alors pocher les huîtres dans ce bouillon, une minute suffit largement. Épongez les ensuite.

Coupez des bandes de lard de Colonnata d'environ dix centimètres de longueur. Humectez les légèrement de vinaigre balsamique. Entourez les huîtres de cette lanière de lard, la face vinaigrée à l'intérieur. Maintenez le tout avec une pique de bois.

Placez votre four en position gril, ou utilisez une salamandre, et faites griller les anges à cheval sur une seule face, de façon à goûter au double plaisir de ce lard croustillant au dessus et juste fondant en dessous. Dans la version originale des angels on horseback, les huîtres ne sont pas pochées, mais c'est que le bacon supporte d'être grillé de façon plus soutenue que ce délicat lard gras.

Présentez avec le panais grillé bien égoutté, après avoir enlevé les piques de bois d'une esthétique douteuse, et donné un tour de poivre noir. Ne salez pas.


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J'avoue que c'était une réussite. Certes, je connais plutôt bien ces trois produits, mais j'ai d'abord été mû par l'analogie visuelle entre les lamelles de panais et les bandes de lard de Colonnata, et la vague idée de faire une recette blanche comme le marbre de Carrare.

L'association s'est révélée payante, et appréciée des testeurs impitoyables que sont ma femme et ma fille. En fait, les huîtres pochées dans leur eau et l'ajout de ce lard produisent un résultat vraiment salé. La douceur un peu sucrée de ce panais grillé et la fraîcheur du thym-citron apportent un contrepoint idéal.

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Commentaires
C
J'ai pensé avoir l'esprit mal tourné en voyant les images avant de te lire... Séduite à coup sûr mais cela restera un rêve sous ces latitudes.. Enfin dans ma cuisine j'entends.. <br /> Un front anti-cupcakes ??? Rien d'autre pour s'agiter?.... Affligeant
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C
Rooooo c'est génial ! Huitres et Lard de colonnata, mon Dieu que c'est beau :) C'est noté dans mon carnet.
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P
Ca m'étonne de toi que tu parles du front anti-cupcake ! Je ne vois pas le rapport avec ta recette :) mais si le rapport est avec le livre d'Esterelle, c'est autre chose :p <br /> A quand le front anti-surimi ? <br /> Je déconnnnnnnnnnnnnnneeeeeeeeee faut pas tout prendre au sérieux, surtout toi Patrick qui a beaucoup d'humour !!
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L
Merci pour cette très belle démonstration et ces conseils lors du Salon ! Pour ma première participation j'en reviens ravie et j'y retournerai c'est sûr ! A bientôt !
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B
C'est à Soissons que l'on peut faire son "blog out" et cela me fait très plaisir de pouvoir t'y voir pour de "vrai". Les anges à cheval me plaisent bien même si l'idée de pocher les huitres me séduit peu mais il faut savoir sortir de ces habitudes.<br /> a très bientôt
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